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LA DRH DE LA SEMAINE : KARINE USUBELLI, DRH D'ENTORIA ET MEMBRE DE L'ANDRH


Eux aussi sont en première ligne : les DRH. Chaque semaine, stiMA le blog leur donne la parole.

 

« L’émotion reste immense ». Karine Usubelli, membre de l’ANDRH et DRH d’Entoria, revient sur les drames qui ont frappé l’ensemble de la fonction RH la semaine dernière. 

 

Maud Aigrain : Votre profession vient de traverser un moment extrêmement douloureux… Un homme a tué une conseillère Pôle emploi et deux de ses anciennes DRH. Un choc immense pour vous et vos pairs. 

 

Karine Usubelli : L’émotion est immense, en effet. Pour tous les représentants de la fonction RH, mais plus largement, pour toutes celles et tous ceux qui œuvrent en faveur de l’emploi, et qui ressentent un sentiment d’injustice très fort. Le métier de DRH est un métier magnifique, mais souvent méconnu. Notre mission, notre raison d’être, c’est de défendre l’emploi, d’accompagner, de former, de faire grandir les collaborateurs, de les écouter. Or pour beaucoup, notre rôle se limite à embaucher et à licencier. Le DRH est celui qui « incarne » les décisions de l’entreprise en matière d’emploi. Résultat : quand ces choix sont difficiles, quand il faut fermer un site, quand il faut lancer un plan social, c’est lui qui est identifié comme étant le responsable de ces décisions, qui sont pourtant du ressort plus large de la stratégie de l’entreprise. Lui aussi est un salarié de l’entreprise, et si son rôle est parfois de mettre en œuvre des décisions difficiles, son objectif est toujours de trouver le meilleur équilibre possible entre les enjeux humains et les contraintes techniques, réglementaires, économiques… On choisit ce métier parce que l’on a le goût authentique de l’autre. L’année 2020 avait d’ailleurs, je crois, permis à beaucoup de salariés d’en prendre conscience. 

 

Ces drames viennent en effet endeuiller une profession qui a démontré, depuis le début de la crise sanitaire, à quel point elle était essentielle…

 

Je dirais même que l’on a vécu une sorte de mise en lumière inhabituelle. Paradoxalement, lors du premier confinement, et alors que les équipes étaient à distance, je ne me suis jamais sentie aussi proche des collaborateurs. Le contexte, totalement inédit, a recentré les DRH sur les fondamentaux de leur métier : communiquer, accompagner, écouter. La crise sanitaire a rendu visible ce que nous faisions jusque-là sans que cela se sache : aménager les horaires d’un parent isolé, orienter un salarié vers une cellule psychologique, former un manager…  Nous avons fait ce qu’il fallait pour protéger les salariés tout en assurant la continuité de l’activité de l’entreprise, ce qui est exactement le sens de notre métier. Nous avons eu le sentiment d’être à la bonne place. Et nous avons eu des marques de reconnaissance exceptionnelles, de la part des collaborateurs et de nos directions. Mais disons-le : la surcharge de travail et la surcharge émotionnelle ont été très fortes. Ces drames surviennent alors que les DRH sont surinvestis depuis un an. 

 

Et qu’ils sont, vous le regrettez, bien souvent isolés…

 

Vers qui le DRH se tourne-t-il en cas de surcharge émotionnelle ? Heureusement, nous échangeons beaucoup entre pairs. Je n’ai jamais vu autant de solidarité entre DRH que depuis le début de la crise sanitaire. Au plus fort de la crise, nous nous échangions une trentaine de messages par jour. Essentiellement des informations techniques, juridiques mais aussi des messages de soutien, des encouragements, de l’énergie. J’encourage tous mes pairs à adhérer à une association, l’ANDRH ou une autre. La solitude du DRH, c’est un vrai sujet. Les drames de la semaine dernière viennent malheureusement le confirmer. Cela signifie aussi qu’au sein des entreprises, les sujets RH ne doivent pas être considérés comme les sujets du seul DRH. Ils doivent être appropriés par l’ensemble de la Direction de l’entreprise.

 

Comment appréhendez-vous l’année 2021 ?

 

Nous savons que la situation va rester compliquée pendant sans doute encore quelques mois. Et nous sentons qu’il y a un phénomène d’usure : en décembre dernier, selon un sondage Empreinte Humaine et Opinion Way, 50 % des collaborateurs se déclaraient en détresse psychologique. C’est 6 points de plus qu’en mars 2020 ! Parce qu’aux inquiétudes sanitaires sont venues s’ajouter de fortes inquiétudes quant à l’avenir économique. Notre rôle sera, avant tout, de rester à leur écoute. Mais nous devons aussi penser à l’après-crise. Je suis convaincue que les sujets RH ne manqueront pas et que nous, les DRH, auront à porter et à développer de beaux projets. La crise a fait sauter des verrous, elle a levé de nombreux freins. C’est une opportunité formidable pour repenser l’organisation du travail, le management contrôlant, l’organisation des espaces de travail… Recréer du lien social sur le lieu de travail, voilà une belle mission qui attend les DRH en 2021 !

 

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