Eux aussi sont en première ligne : les DRH. Chaque semaine, stiMA le blog leur donne la parole.
« La formation à distance, une lame de fond soulevée par le confinement. » Nature & Découvertes a profité de la crise pour faire monter en compétences un maximum de collaborateurs. Quand la crise rime aussi avec opportunité : on en parle avec Anne Deneux, la DRH de Nature & Découvertes (plus de 1000 collaborateurs répartis entre magasins, entrepôts et siège).
Maud Aigrain : Vos boutiques ont pu rouvrir le week-end dernier. Comment les équipes ont-elles vécu ce moment ?
Anne Deneux : Avec bonheur ! Je crois que tout le monde attendait cela avec beaucoup d’impatience ! Même si, en réalité, contrairement au printemps dernier, nos magasins sont restés ouverts pendant la quasi-totalité du deuxième confinement, pour permettre le click & collect. Nous avions d’ailleurs beaucoup communiqué, sur notre site internet, sur les réseaux sociaux, sur les vitrines de nos magasins, pour expliquer à nos clients que nous proposions ce service. Cela nous a permis de maintenir une partie de l’activité et, plus important encore sans doute, la motivation des équipes. Mais soyons francs, le click & collect n’a pas permis de faire des miracles côté ventes. La réouverture, samedi 28 novembre, était donc très attendue ! Avec les huit membres du comité de direction, nous nous sommes rendus dans les magasins pour vivre ce moment avec les collaborateurs. C’était important de pouvoir partager cela avec eux. Traditionnellement, en décembre, pour le rush de Noël, les salariés du siège qui le souhaitent peuvent donner un coup de pouce dans les boutiques ou dans les entrepôts. Cette année, nous voulions vraiment marquer le coup.
Le rush de Noël… Les commerçants l’espèrent mais force est de constater que ça n’a pas été la cohue le week-end dernier.
C’est vrai. Et c’est pour cela que le week-end des 5 et 6 décembre va être un vrai indicateur. En ce qui concerne le week-end dernier, il y a plusieurs interprétations possibles : certains clients ont peut-être eu peur de l’affluence justement, peur de devoir attendre trop longtemps à l’extérieur des magasins, en raison du nouveau protocole sanitaire qui impose une jauge de 8 m2 par client. D’autres ont peut-être attendu le Black Friday (décalé cette année au 4 décembre), un événement remplacé par le Fair Friday chez Nature & découvertes, mais on peut imaginer que cela a impacté l’affluence dans les rues et les centres commerciaux. Nous allons donc regarder de très près ce qui va se passer maintenant. Si l’affluence est à nouveau plus faible que d’habitude pour un week-end de décembre, nous devrons analyser les chiffres pour savoir si les achats se sont déportés vers le e-commerce, ou si les clients ont décidé d’étaler leurs achats sur la semaine pour éviter les files d'attente. En tout état de cause, nous allons pouvoir mesurer l’impact de la jauge sur le comportement des clients.
Jauge ou pas, l’essor du e-commerce est tel que c’est une tendance qui ne s’inversera pas…
C’est, en effet, une lame de fond. Nos ventes en ligne ont été multipliées par trois par rapport à l’an dernier sur les dernières semaines. La tendance était déjà là, évidemment, mais les deux confinements successifs ont joué un rôle d’accélérateur. Mais cela ne signifie pas, pour autant, que les clients vont déserter les magasins. Chez Nature & Découvertes, nos vendeurs ont toujours été des conseillers, et même des formateurs, à travers par exemple les différents ateliers que nous pouvons proposer aux enfants ou aux adultes. Cela fait partie de l’ADN de notre marque et c’est ce que nos clients vont continuer à rechercher, même s’ils décident de finaliser leurs achats, plus tard, depuis chez eux.
Pendant les périodes de fermeture, comment avez-vous fait pour garder le lien avec l’ensemble des collaborateurs ?
D’autant qu’ils sont répartis sur toute la France ! Tout l’enjeu était de garder le lien avec l’ensemble des collaborateurs, sachant que, légalement, nous n’avions pas le droit de contacter celles et ceux qui étaient en chômage partiel. Et, de toute façon, nous n’avions pas les adresses mails de l’ensemble des collaborateurs. Contrairement aux directeurs de magasins et aux encadrants, les vendeurs n’ont, en effet, pas d’adresse mail professionnelle. Pour autant, maintenir ce lien social nous semblait absolument essentiel. Concrètement, lors du premier confinement, les directeurs de magasins ont pris l’initiative de créer des groupes WhatsApp, que leurs équipes pouvaient décider de rejoindre, sur la base du volontariat. Pendant le deuxième confinement, nous avons beaucoup utilisé notre réseau social interne, sur lequel nous communiquions chaque jour. Sur l’entreprise, sur la nature… Notre directeur général, Antoine Lemarchand, a régulièrement pris la parole. Nous avons également diffusé beaucoup de vidéos pour des ateliers, des formations. Enfin, nous avons mis en place une « Foire aux questions » pour répondre à toutes les interrogations pratiques des collaborateurs, qu’il s’agisse de questions relatives à l’activité partielle, la prise de congés, etc. Notre objectif était de réduire au maximum leurs inquiétudes. Ce réseau social interne est un canal de communication qui fonctionne très bien : non seulement, le nombre de personnes inscrites a fortement augmenté lors du second confinement, mais le nombre de connexions aussi. Les collaborateurs y vont plus régulièrement qu’avant.
Vous avez évoqué des ateliers et des formations. Vous avez, en effet, profité de cette période pour multiplier l’offre de formation à destination des collaborateurs…
Je dirai qu’avec le e-commerce, le développement de la formation à distance est la seconde lame de fond soulevée par les confinements. Le budget formation est très conséquent chez Nature & Découvertes, 6% de la masse salariale. Auparavant, la plupart des formations avaient lieu en présentiel. Cela signifiait de gros coûts de déplacements et d’hébergement pour accueillir les collaborateurs venus de la France entière. En outre, cela rendait l’accès aux formations compliqué pour certains collaborateurs, notamment ceux qui travaillent à temps partiel, pour qui cela reste difficile de dédier deux ou trois journées à une formation. La crise sanitaire a accéléré une tendance sur laquelle on travaillait déjà : la formation à distance. Nous avions déployé notre plateforme de e-learning l’an dernier. Nous avons renforcé son contenu, ce qui nous a permis de former beaucoup plus de monde, beaucoup plus rapidement, sur des sujets et avec des formats très variés. Quand ce sera à nouveau possible, nous maintiendrons quelques formations en présentiel, parce que cela nous permet de réunir des gens qui ne se connaissent pas, mais la formation à distance, c’est véritablement un outil formidable pour développer les compétences.
Question rituelle pour terminer : quel impact cette crise va-t-elle laisser sur le rôle des DRH ?
Mon grand-père était chinois. En chinois, le mot crise signifie tout à la fois « danger » et « opportunité ». J’en suis absolument convaincue. Nous venons d’en parler, cette crise a été une opportunité pour former davantage de collaborateurs. C’est une opportunité aussi pour mettre en avant les valeurs de Nature & Découvertes… la nature, des produits responsables, des engagements très forts en faveur de l’environnement… Tout cela résonne évidemment aujourd’hui. Enfin, c’est vrai, cette crise a aussi mis les fonctions RH dans la lumière. Notre rôle s’est renforcé. Avec les partenaires sociaux, le dialogue a été intense et riche. Au sein du comité de direction, nous avons été très écoutés. La gestion des ressources humaines était véritablement au premier rang des priorités. Pour une DRH, c’est évidemment une grande satisfaction.
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